Etre ou ne pas être…
Beaucoup trop de gens ne font qu’exister et survivre, au lieu de vivre. Beaucoup trop de
gens ne vivent ni pour eux-mêmes, ni par eux-mêmes, mais par procuration. Beaucoup trop
de gens se lisent et se définissent dans le regard des autres. Ils sont prisonniers de la société
qui érige en standards, des normes et valeurs auxquelles ils se soumettent. Ils n’ont aucune
personnalité propre, ni aucune vision conforme à leurs aspirations personnelles véritables.
Ils manquent cruellement d’esprit d’analyse et adhèrent sans filtre à la pensée dominante,
en se réappropriant machinalement le narratif officiel. On donne tout pour paraître et plaire
à la société, on exhibe au milieu des foules un semblant de bonheur et d’assurance, mais
une fois seuls, on fait face à sa misère. On s’accommode de fausses apparences pour donner
l’impression qu’on vit, on se conforme machinalement aux prescriptions de la société pour
se donner bonne conscience, mais au final, on n’est ni l’autre qu’on s’évertue à singer, ni soimême. On n’est finalement personne. Les obsessions à l’accumulation matérielle, l’argent, le
luxe et la bonne chair n’auront jamais suffit à nous sortir de notre profonde misère
spirituelle. Les êtres humains conformistes ne sont plus que des cadavres ambulants, sans
aucune âme. La population mondiale est soumise à ce diktat de la pensée unique, cet
impérialisme culturel qui consiste à faire passer des idéaux personnels et privés en idéal de
société. Ce sont les obsessions hégémoniques d’un groupuscule d’individus qui jouent à Dieu
et prennent en otage les humains pour expérimenter, et ensuite imposer, leurs fantasmes
qu’ils érigent en valeurs universelles.
Face à cette imposture inacceptable, se fondre dans la masse et se taire pour éviter de
mécontenter les gardiens du nouvel ordre imposé, est devenu un signe de sagesse, le canal
ultime pour préserver sa vie et son confort personnel. La grille de valeurs qu’impose la
société est nécessairement biaisée par les intérêts égoïstes de la petite minorité qui détient
le pouvoir de façonner les mentalités et de formater les esprits dans le sens de ses
desideratas. Les normes sociétales prescrites par les dirigeants de ce monde au service des
officines obscurantistes, ne correspondent pas nécessairement aux aspirations et valeurs
individuelles des citoyens. Mais le pouvoir de persuasion et la force de contraindre de ceux
qui pensent notre bonheur à notre place, nous soumettent aux codes et modèles tout droit
sortis de leur imagination. On se retrouve ainsi dans un monde de simulations et simulacres,
où sincérité et authenticité ne sont plus que des leurres. On a alors des gens qui pensent
être libres, mais qui ne sont en réalité que des captifs des systèmes dominants. Par
assimilation docile, ils ont choisi de paraître plutôt que d’être. Et pour entretenir ce monde
éphémère d’illusions et de manipulation, les médias aux ordres sont au rendez-vous pour
servir de relais et maintenir les esprits fébriles dans la servitude généralisée.
Mais qui pour sauver l’humanité de la cécité intellectuelle dans laquelle elle est plongée ?
Qui pour rallumer les cerveaux obscurcis par les caprices pervers d’une classe dirigeante
corrompue ? Qui pour sortir les populations des abîmes de la décadence morale
dominante ? Qui pour restaurer la dignité humaine face à l’errance spirituelle dans laquelle
s’embourbe chaque jour un peu plus l’humanité ? Qui pour libérer le monde des prédateurs
invétérés qui asservissent les peuples ? Qui pour rendre à l’humanité sa liberté et sa
dignité ? Qui pour assumer les risques de nager à contrecourants et dénoncer toutes les
dérives sociétales qui sévissent à travers le monde ?
Nous sommes trop occupés à assurer notre quotidien vital pour nous préoccuper des justes
causes. Nous n’avons pas de temps pour nous poser les questions essentielles sur les
véritables sources de nos malheurs. Nous considérons comme relevant de l’ordre naturel
des choses, toutes les peines et souffrances que nous endurons, et nous nous résignons aux
indulgences de la providence. Nous sommes si distraits que nous avons fait de nos
bourreaux nos alliés et de nos alliés nos ennemis. Nous pleurons, gémissons et prions, en
attendant passivement la manne du ciel. Nous n’avons pas assez de cran pour sonner le
tocsin de la révolte. Nous avons fait le choix de la résignation et de la soumission. Nous
sommes des lâches. Nous refusons de nous battre face à l’adversité, y compris au péril de
nos vies, pour offrir à nos enfants un monde meilleur. Nous nous complaisons dans la
distraction et les plaisirs éphémères pour laisser le soin à nos oppresseurs de façonner le
monde en leur faveur. Nous savons et disons tous ce qu’il faut faire, mais assumons de
croupir dans notre misère. Nous aimons trop nos vies et nos apparences de confort pour agir
et braver la mort. Tels des damnés de la terre, nous avons choisi la prière pour éviter de
sortir de nos chaumières. Nous sommes chacun responsables de notre condition puisque
nous acceptons, docilement, de compromettre notre liberté. Nous nous donnons pour
lanternes des intellectuels des plateaux télé qui, pourtant, méprisent nos impératifs de
liberté. Nous avons confié notre destinée à des égarés qui fomentent toutes sortes de
complots contre l’humanité.
Lève-toi et arrête de te plaindre !
Réveille-toi et cesse de geindre !
Sors de ton conformisme servile
Sors des rangs des esprits fébriles
Pose des actes qui résonnent pour la postérité
Laisse tes traces sur le chemin de la liberté
Défais-toi des schémas imposés
Agis pour le salut de l’humanité.
Paul ELLA
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